Regain (Comme autrefois...)                            
                                   
                                 

...Un petit bonheur pour moi, c'était,avant de monter dans le camion ou le car qui allait nous mener à St-Agrève, la visite à la Chapelle pour prier pour que le voyage se passe bien. Oh, je n'étais pas plus pieux que ça.

Mais là, dans le silence et le recueillement d'abord , les prières et les chants ensuite, je commençais à vivre ces moments merveilleux qui nous attendaient en colo.

"Au nom du Père et du fils et du St-Esprit....
...Et la fraîcheur qui emplit le soir nos vallons. "

Et cette fraîcheur était là, à travers les mots. Le vallon et le Mont Besset venaient à nous. Les fayards (hêtres) ardéchois se dressaient sous mes yeux prèts à nous accueillir pour les parties de guerre au sifflet. Le paradis était là. C'est sûr . Dans les bois , par les sentiers, les ruisseaux et les rivières, par la nature entière que nous allions rencontrer loin de la cité bruyante et sale de fumées d'usines.

Ceux qui ne partaient pas profiteraient des grands jeux dans la cour, du bassin, des "tours de France " avec le cerceau. Des guerres avec les boucliers et les balles en chiffon.. Ils auraient de nouvelles de là-haut, de ces monts du Vivarais où les plus chanceux allaient vivre tout un mois.

Et puis le temps a passé . Disparues les grandes heures de fraternité; les assemblées riantes et colorées des dimanches. Pour toujours ?

Non! Comme le regain de Marcel Pagnol, et pareille au Phénix, l'Oeuvre renait de ses cendres. Samedi ils étaient une trentaine à disputer un match de foot sur le terrain de mon enfance. Eternel jeune homme, le Père Albert arbitrait les débats.

Et j'étais là, en visite pour parler du site. Lorsqu'a sonné l'heure de la chapelle, je n'ai pu résister : je suis entré derrière les enfants, en rangs et en silence. Comme autrefois, le recueillement était là, la magie de la prière, de la chapelle, et les enfants aussi ;tout comme autrefois:avec celui qui écoute attentivement, celui qui rêve, celui qui rit et se dissipe: les enfants restent des enfants. Mais le monde d'aujourd'hui, lui,était resté dehors. Ici on était à l'abri. Comme pour le départ en colo, il se passait quelque chose. mais quoi?

Instants bénis où l'esprit supplante le corps où l'on découvre une autre part de soi-même. Instants bénis que seule l'Oeuvre sait et peut apporter.C'est peut-être cela qu'on appelle la Grâce.

Jean Santelli