Timon David
. La
première fois où j'en ai entendu parler c'était
en 1946, en juillet pour être plus précis. Le comptable
de l'atelier où travaillait ma mère chemisière,(Antoine
Simula ) la voyant embarrassée pour les grandes vacances,
lui avait conseillé de m'inscrire pour la colo d'août
qu'on appelait la 2e colonie. Le lieu su séjour importe
peu mais je le citerai quand même, c'était le local
des frères de La Louvesc.
L'uvre s'appelait alors " uvre Saint Mauront
Bellevue " avec entre parenthèses le nom Timon
David.
Et j'en demande pardon par avance à Paul Hava et aux décideurs
qui ont appellé l'uvre , Paul Hava, mais pour moi
elle est restée Saint Mauront-Bellevue (Timon David)
Ceci dit, en 1946 à 7 ans et demi, je ne savais pas grand-chose
de tout ça. Je ne comprenais pas pourquoi le Père
Buf s'évertuait à prendre la défense
du Maréchal Pétain sous les ordres de qui il avait
" fait " Verdun, comme on disait . Mais je comprenais
une chose avec cette certitude enfantine que rien ne peut atténuer
: j'appartenais à une communauté exceptionnelle.
(je ne l'énonçais pas comme ça bien sûr)
.
J'étais un TIMONIEN .
La preuve, c'est que je l'entendais dire un peu partout : et surtout
je l'entendais dire avec fierté. Être " timonien
", c'était quelque chose . Je ne savais pas trop quoi,
mais en tout cas c'était quelque chose de bien. Et puis
nous avions un uniforme ce qui n'était pas rien pour un
enfant: chemise blanche ,pantalon kaki, béret noir et surtout
sur notre chemise et sur le béret un écusson avec
nos " armoiries " comme les rois, et les nobles, Cet
écusson je ne saurais pas le décrire avec exactitude
,mais il comportait les couleurs de la papauté (blanc et
jaune) du bleu et du rouge mais ce que je revois bien, ce sont
les initiales T et D entrelacées mais pas stylisées
comme maintenant, non T et D classiques, je dirai franches.
Et cet écusson a été la cause de ma première
réflexion sur l'intolérance. Peut-être même
si je suis devenu ce que je suis , un peu rebelle à toutes
formes d'idéologies (et même de hiérarchie)
c'est à cette première découverte de Dame
bêtise qu'on appelle l'intolérance.
J'allais à l'école communale de la rue Félix
Pyat. Plusieurs de mes copains de l'uvre aussi. Un jour
, l'un d'eux arrive à l'école avec sa chemise blanche
et son écusson cousu côté cur.
Personne n'a fait attention à la chose. Même pas
moi qui en parle maintenant. Mon copain s'était habillé
comme ça un point c'est tout . A cette époque les
familles du quartier ne roulaient déjà pas sur l'or
et une chemise ne se gardait pas que pour le dimanche à
l'uvre.
Mais voilà qu'un instituteur (que j'ai eu en cm2 ) s'approche
et apostrophe mon camarade.
" Les signes comme ça sont interdits à l'école.
Alors cet après midi . Tu ne viens pas avec cette chemise
. "
J'étais soufflé, stupéfait. Gêné
et honteux à la fois . Un peu révolté aussi.
Comment ? Ce qui pour moi était un signe de qualité
humaine, morale, de joie, de services rendus, enfin tout ce qu''on
m'apprenait à l'uvre, était considéré
comme indigne de se montrer dans mon école ? Et c'est un
" maître " qui agissait comme ça ?
J'ai su plus tard que ce maître appartenait aux A.I.L. (amis
de l'instruction laïque) . Mais à cet âge, je
ne posais pas la question en terme général. Pour
moi c'était le caractère de cet homme qui me paraissait
être en cause. Pour moi c'était surtout un être
sectaire (je pensais " méchant " ).
Oui ce jour j'ai découvert sans le savoir madame l'intolérance
souvent accompagnée de sa dame de compagnie " la bêtise
"
Plus tard devenu directeur
d'école communale, une de mes fiertés, sera d'avoir
eu des relations amicales avec le curé de la paroisse qui
viendra même un jour à l'improviste dans ma classe
chanter avec mes élèves " la prière
" (Francis James - Brassens), de manger en classe des gateaux
traditionnels aux fêtes musulmanes ou juives , gâteaux
confectionnés et offerts par les familles. En somme Paix
sur Terre aux hommes de bonne volonté. En fait Noël
toute l' année
Voilà ce que m'inspire le nom de Timon David , Voilà
pourquoi je reste fier d'être Timonien et de le faire savoir