Village au fond de la vallée...

 

Cela se passe en 1949.... J'ai 10 ans. j'en suis à ma 4e colo. Nous sommes toujours à La Louvesc chez les frères . Je me suis habitué à ces lieux, à l'éloignement de ma famille . Je ne pleure plus. J'ai grandi.
Le réfectoire est toujours aussi insuffisant pour accueillir l'ensemble des colons. On se déplace avec peine entre les tables.

Pourtant de temps en temps, et c'est le cas ce soir, un invité vient partager notre repas. . Qui est-il celui qui vient ? Je ne sais plus ,mais l'ai-je jamais su ? Pour moi cet invité restera celui qui m'a apporté un message , pas très bien compris à cette époque mais quand même , suffisamment marquant pour prendre racine et ne plus me quitter tout au long de ma vie .
Ce monsieur nous a chanté :la chanson des compagnons et d'Edtih Piaf: les trois cloches. Je le revois, debout contre le mur face à l'entrée. Oui je le revois et je l'entends même:une belle voix grave.
Effet magique de cette chanson qui a traversé les décennies pour être aujourd'hui encore ,une des plus connues de la chanson française classique si je puis dire .
(Je veux dire par là , pas une chanson issue du showbizz).

A cette époque ce village au fond de la vallée c'était pour moi La Louvesc ou mieux encore un petit hameau aujourd'hui disparu qui s'appelait Verine ou Vedrine. Mais plus que cela j'ai été marqué ,je pense , par la déouverte de la marche inexorable du temps:


1er cloche...la naissance de Jean François Nicot, son baptème. Puis les années passant, 2e cloche ,son mariage et enfin la 3e et dernière celle du glas annonçant sa mort . Mais pas de désespoir: la vie éternelle est là.
Depuis cette année là je ne peux m'empêcher de ressentir en l'écoutant une drôle de sensation. L'impression que tous les acteurs de ce soir de juillet 1949 sont là ,à côté de moi , à écouter eux aussi encore et toujours ces trois cloches dans un paysage paradisiaque, pas encore pollué par le monde mécanique et mercantile.
J'ai 75 ans, j'ai déjà entendu deux cloches. Dans combien la 3e ? Je ne sais ...mais je n'en ai pas peur. Je me rappelle la fin de la chanson.

 

Alors je vous invite à écouter ce chant et à méditer ses paroles:
Cliquez sur la photo pour l'écouter


Village au fond de la vallée,
comme égaré, presqu'ignoré.
Voici qu'en la nuit étoilée
un nouveau-né nous est donné.
Jean-François Nicot il se nomme.
Il est joufflu, tendre et rosé.
A l'église, beau petit homme,
demain tu seras baptisé.

Une cloche sonne, sonne.
Sa voix, d'écho en écho,
dit au monde qui s'étonne:
"C'est pour Jean-François Nicot.
C'est pour accueillir une âme,
une fleur qui s'ouvre au jour,
à peine, à peine une flamme
encore faible qui réclame
protection, tendresse, amour."

Village au fond de la vallée,
loin des chemins, loin des humains.
Voici qu'après dix-neuf années,
coeur en émoi, le Jean-François
prend pour femme la douce Elise,
blanche comme fleur de pommier.
Devant Dieu, dans la vieille église,
ce jour, ils se sont mariés.

Toutes les cloches sonnent, sonnent,
Leurs voix, d'écho en écho,
merveilleusement couronnent
la noce à François Nicot.
"Un seul coeur, une seule âme",
dit le prêtre, "et, pour toujours,
soyez une pure flamme
qui s'élève et qui proclame
la grandeur de votre amour."

Village au fond de la vallée.
Des jours, des nuits, le temps a fui.
Voici qu'en la nuit étoilée,
un coeur s'endort, François est mort,
car toute chair est comme l'herbe,
elle est comme la fleur des champs.
Epis, fruits mûrs, bouquets et gerbes,
hélas! vont en se desséchant...

Une cloche sonne, sonne,
elle chante dans le vent.
Obsédante et monotone,
elle redit aux vivants:
"Ne tremblez pas, coeurs fidèles,
Dieu vous fera signe un jour.
Vous trouverez sous son aile
avec la vie éternelle
l'éternité de l'amour."

 

 

 

 

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